Littérature

Retour
Avril 1975. François Ponchaud, missionnaire français vivant au Cambodge depuis une dizaine d'années, assiste à l'évacuation totale de Phnom Penh après sa " libération " par les Khmers rouges. Nul ne sait ce que donnera la " révolution radicale " annoncée par les vainqueurs, mais après les bombardements américains et la corruption notoire du régime de Lon Nol, elle est regardée avec une certaine sympathie par l'opinion publique occidentale. Aussi, quelques mois plus tard, lorsque François Ponchaud rendra publics les témoignages inouïs qu'il a rassemblés sur ce véritable cauchemar, il se heurtera à l'incrédulité générale. Ce n'est qu'au terme d'une lutte acharnée qu'il parviendra à faire entendre l'incroyable vérité dans la presse française, puis internationale : il s'agit d'un génocide dont les victimes se comptent déjà par centaines de milliers.
Benoît Fidelin, journaliste à Pèlerin Magazine, nous raconte ici le destin hors du commun de ce témoin de l'Évangile, qui a choisi de se plonger corps et âme dans une culture khmère tout imprégnée de bouddhisme. Depuis son retour au Cambodge en 1993, François Ponchaud ne cesse de dénoncer d'autres scandales, comme les détournements de l'aide humanitaire, ou la mise à sac du pays par les puissances militaro-mafieuses. Il a surtout entrepris, avec les plus pauvres, un énorme travail de reconstruction spirituelle, pour lutter contre le désespoir d'un peuple martyrisé.
" Brutalement un orage éclata accompagné d'un vent violent. En quelques minutes, l'air devint glacial. Etant le seul enfant, je m'accroupis dans l'eau de la rizière pour avoir moins froid et être un peu à l'abri du vent. Aussitôt le garde me vit. Il accourut une lanière à la main en criant que j'étais un paresseux et qu'il allait me fouetter. Je hurlai de peur en lui expliquant que je me remettais tout de suite au travail, et en le suppliant de ne pas me frapper. Mais le Khmer rouge paraissait décidé à faire usage de sa lanière. C'est alors que Môm, ma belle-sœur, s'interposa entre le garde et moi. Elle le saisit par le poignet et, le regardant droit dans les yeux, elle le défia, semblant dire : "Si tu le touches, je te tue". " A travers le récit de son enfance, Malay Phcar, nous entraîne dans l'univers khmer rouge ou plutôt dans " L'Enfer khmer rouge ". Tout commence le 17 avril 1975, alors que Malay a 8 ans. Ce jour-là, les Khmers rouges prennent Phnom Penh, la capitale du Cambodge, où jusqu'ici Malay menait une enfance heureuse. Brutalement c'est le drame. Les Khmers rouges donnent l'ordre insensé d'évacuer les trois millions d'habitants de la ville en quelques heures. Pendant quatre années, 1360 jours exactement, les soldats de l'Angkar vont faire régner la terreur. Ce livre est le témoignage poignant d'un enfant pris dans la tourmente et, comme le souligne le Père François Ponchaud, il dénonce " ce régime kafkaïen dans lequel tout sentiment humain semblait avoir déserté les responsables ".
François Bizot, membre de l'Ecole française d'Extrême-Orient, est fait prisonnier au Cambodge par les Khmers rouges, en 1971. Enchaîné, il passe trois mois dans un camp de maquisards. Chaque jour, il est interrogé par l'un des plus grands bourreaux du vingtième siècle, futur responsable de plusieurs dizaines de milliers de morts, aujourd'hui jugé pour crimes contre l'humanité : Douch.
Au moment de la chute de Phnom Penh, en 1975, François Bizot est désigné par les Khmers rouges comme l'interprète du Comité de sécurité militaire de la ville chargé des étrangers auprès des autorités françaises. Il est le témoin privilégié d'une des grandes tragédies dont certains intellectuels français ont été les complices.
Pour la première fois, François Bizot raconte sa détention, décrit une révolution méconnue, démonte les mécanismes de l'épouvante et fait tomber le masque du bourreau monstre.
Grâce à une écriture splendide et à un retour tragique sur son passé, l'auteur nous fait pénétrer au cœur du pays khmer, tout en nous dévoilant les terribles contradictions qui dans les forêts du Cambodge comme ailleurs habitent l'homme depuis toujours.
Ethnologue, François Bizot a été affecté depuis 1965 dans différents pays de la péninsule indochinoise, dont il étudie la religion. Directeur d'études à l'Ecole pratique des hautes études, il est titulaire de la chaire de " Bouddhisme d'Asie du Sud-Est ".
Où en est aujourd'hui, le Cambodge, après le 17 avril 1975, date de la victoire des révolutionnaires khmères ?
Témoin oculaire de la prise de Phnom Penh, François Ponchaud nous en fait revivre les péripéties : entrée des révolutionnaires, exode forcé de toute la population. Il évoque ensuite la prise du pouvoir dans les provinces, la désertion des villes et des bourgades par un peuple livré de force au travail de production agricole.
Par une analyse du discours officiel tenu par la radio, l'auteur décrypte les buts poursuivis par la révolution, l'organisation de la nouvelle société, la formation idéologique du peuple, la création d'une nouvelle culture. Par sa radicalité même, cette révolution comporte des traits spécifiques que l'auteur situe dans le contexte historico-social qui l'a vue naître, ainsi que dans l'histoire personnelle de ses leaders actuels.
Révolution fascinante et terrifiante … L'expérience cambodgienne est un défi qui interpelle tout homme.

François Ponchaud, né en 1939, membre de la Société des Missions Etrangères de Paris, a vécu au Cambodge de 1965 à 1975. Il y séjourne aujourd'hui une partie de l'année.

Voyage au Cambodge de Louis Delaporte est probablement l'un des plus beaux témoignages de ce que furent les premiers pas des découvreurs d'Angkor. Cartographe et dessinateur, Delaporte participa d'abord à la mission d'exploration du Mékong de Doudart de Lagrée en 1866. Il retourna au Cambodge avec sa propre expédition afin de constituer une collection d'art khmer. À la suite de cette mission, il écrira le récit de son voyage. L'intérêt du livre, c'est qu'il nous relate l'instant d'une découverte, l'élaboration d'une mise en scène de tout ce qui va déterminer le succès des collections d'art khmer. On assiste à la mise à jour par Delaporte, au fur et à mesure de sa progression, de quelques-unes des plus belles sculptures qui constituent actuellement le fonds du Musée national des Arts asiatiques Guimet à Paris.
"En fouillant au milieu de l'amas de décombres, nous exhumâmes entre autres objets, un personnage de pierre dont les pieds et les huit bras étaient brisés, mais dont la tête, pleine d'expression et de finesse, était demeurée intacte, toute la personne du dieu ou du saint est formée d'une multitude de petites divinités, les unes assises, les autres dans l'attitude de prières, les mailles de la cotte dont il est vêtu sont des figurines, sa ceinture, son collier, de petits dieux, ses cheveux même autant de personnages nains."
Voilà un somptueux livre d'images fascinant par la magie de tous ces dessins qui nous font approcher l'atmosphère qui entourait les monuments khmers aux temps anciens de leur découverte.